"Vous n'avez rien de mieux à faire le dimanche matin... ?"

Publié le par Section socialiste de Sciences-Po

Lors de la dernière campagne municipale à Paris, plusieurs militants de la section Sciences Po se sont fortement investis pour soutenir Laurence Girard, tête de liste "Paris, un temps d'avance" dans le 7ème arrondissement. La droite a malheureusement atteint son seul objectif : remporter cinq sièges de conseillers de Paris sur cinq. Cela ne nous pas empêché (et le résultat s'en ressent malgré tout !) d'avoir mené un campagne de terrain extrêmement dynamique, faite de propositions plus que de critiques, reposant en outre sur une véritable vision de l'arrondissement.

Faire campagne dans le 7ème arrondissement de Paris (une pensée à nos camarades du 16ème ou de Neuilly...) est toutefois loin d'être évident pour tout socialiste. Récit de deux militants récemment engagés dans la section et déjà pleinement impliqués.

 

Vous méprisez les grasses matinées ? Vous ne voulez décidément pas commencer ce fichu exposé à rendre le lendemain ? Vous espérez à rencontrer des gens ? Ou alors, plus philosophiquement, vous pensez que le monde (et la mairie de Paris) appartient à ceux qui se lèvent tôt ? Alors rendez-vous rue Cler dans le 7ème arrondissement. Une matinée militante pleine de joie et de rencontres autant inattendues qu’inoubliables vous attend.

 

11h dans LA rue marchande de cet arrondissement. Foulards roses (ou rouges ? la question reste ouverte) savamment noués autour du cou, badge ‘Laurence Girard’ king size étincelant à la boutonnière, et les bras chargés d’une pile de magnifiques tracts que l’UMP même nous envie, nous montons au front dans cette terre de mission (75% de votes Sarkozy le 6 Mai). Il s’agit de tenter de convaincre le plus d’électeurs qu’il est temps que le 7ème s’inscrive lui aussi dans l’ambition parisienne portée par Bertrand Delanoë depuis 2001. Les troupes socialistes sont nombre, mais la concurrence est rude, la rue Cler étant le champ de bataille principal de la campagne ; on y retrouve ainsi tout le spectre politique, du PCF (allié par ailleurs de la liste de Mme Girard) au FN.

 

Militer à gauche dans le 7ème c’est tout d’abord laisser son amour-propre au vestiaire. Démonstration par l’étonnant panel de stratégies d’esquive que les habitants bien-aimés déploient pour éviter d’avoir les bras submergés (pour certains, ‘souillés’) de tracts socialistes. Du plus répandu ‘je-ne-croise-surtout-pas-ton-regard (on n’est jamais trop prudent) et-je-t’ignore-quand-tu-me-dis-bonjour’ à la moins généralisée sonnerie de portable qui sonne à pic, les occasions de se décourager ne manquent pas. Que répondre à un lapidaire « mon vote est acquis » ? Que dire à un habitant qui décline votre offre en clamant, un programme UMP à la main (oui oui ils ont un programme), « non merci je l’ai déjà » ? Mais nous ne sommes pas au bout de nos peines et certains refus sont bien plus explicites et catégoriques.

 

Militer dans le 7ème en effet, c’est aussi parfois savoir faire face à une hostilité non entièrement imputable à l’heure matinale (il est 11h tout de même). Certains manques de tolérance tels  que « ah non, pas un homosexuel ! » ou « Delanoë c’est la mort ! » nous laissent perplexes. Il est évident en outre que chez une partie de l’électorat, la gauche ne jouit pas d’une réputation conforme à ce qu’elle est réellement et objectivement. Ainsi des cris « anarchistes ! » ou « fainéants ! » que le militant endurci doit savoir affronter (par la débat, non par un « casse toi, pauv’con »). D’autres tentent également de nous piéger : « Et le PCF, il existe encore, il fait une liste ? –Oui, il fait partie de la liste ‘Paris un temps d’avance’ –Ah bah, je sais pour qui il ne faut surtout pas voter alors. ».

 

Mais au-delà des répliques partisanes, militer dans le 7ème s’est également s’étonner de saillies aussi incongrues qu’apolitiques. Preuve de la diversité de cet arrondissement, nous rencontrons souvent des étrangers qui s’enquièrent de notre activité : « What are you doing ? – Elections – Ahhh okay, good luck ! » et à qui, par solidarité transnationale, nous laissons tout de même un joli tract rose. Nous avons dit ‘rose’ ? Cette couleur n’est pas sans entretenir une certaine ambiguïté dans l’esprit de certains, comme cet habitant qui nous aborde ainsi : « Il est rose votre foulard ? Vous savez ce que ça peut signifier ? ». Un autre, que l’on peut à souhait envisager soit comme quelqu’un d’extrêmement prévenant soit comme un ‘suppôt’ de l’UMP désireux de mettre fin à notre noble entreprise, nous interpelle de la sorte : « Vous n’avez rien de mieux à faire un dimanche matin ? Allez donc voir les filles ! ».L’évènement le plus surprenant fut la rencontre avec un représentant d’une tendance politique que l’on croyait disparue et fossilisée depuis longtemps : «Vous êtes qui vous ? -le Parti socialiste - Ahhh vous êtes socialistes, nous on est royaliste, ce n’est pas vraiment la même chose ». Stupeur ! le fantôme de Louis XIV hante-il encore les rues chargées d’histoire de l’arrondissement ?1

 

Enfin, militer dans le 7ème peut malgré tout apporter des satisfactions indéniables. En dépit de la difficulté de la tâche, les encouragements ne manquent pas ; des phrases telles que « C’est bien les gars, vous au moins vous ne votez pas pour les milliardaires » ou « Ah enfin une liste de gagnants ! » redonnent confiance au militant transi de froid (pourquoi les élections ne seraient-elles pas en juin ?). De même, il n’est pas rare que des passants, sympathisants socialistes pour la plupart, s’arrêtent discuter un moment. Mais ce qui nous conforte dans l’idée que nos efforts n’ont pas été vains, c’est le fait que, de toute évidence, les idées et la personnalité de notre candidate ont progressé de rue en rue et de marché en marché. Il n'était donc pas absurde de penser que tous les espoirs, et notamment une présence socialiste au 2nd tour, était permise le 16 mars.

 

Thomas B. et Michele Ferrari

 

 

: dans un souci d’équité républicaine, nous rappelons, qu’au delà de nos sarcasmes, le parti Alliance Royale présentait effectivement une liste dans le 7ème arrondissement (l'un des trois endroits de France d'ailleurs...).

Publié dans Point de vue militant

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J
@ Sharky<br /> <br /> - sur les impôts, encore une fois je t'ai déjà dit même si Valérie te le dit, que les publications UMP n'ont jamais été reconnues pour leur rigueur scientifique, pas plus que les publications PS d'ailleurs. Pour passer un bon moment de franche rigolade, j'invite d'ailleurs tout le monde à voir cette vidéo (d'où vient l'"inspiration" de Sharky) : <br /> <br /> Après une telle vidéo, on ne comprend pas pourquoi les électeurs ont massivement voté UMP !<br /> http://www.dailymotion.com/video/x4ov6a_voter-a-gauche-dimpots-et-de-pouvoi_politics<br /> J'invite aussi à lire cet autre article, certes moins sexy que Frédéric Lefebvre, je te l'accorde : http://elections.lesechos.fr/elections-2008/campagne/4700293.htm<br /> <br /> Après lecture de cet article, tu regretteras que Marseille n'ait pas basculé à gauche pour les contribuables...<br /> <br /> - sur le logement, tu nous reproches d'aborder un sujet que tu abordes de ton propre chef dans un billet qui ne lui était pas consacré a priori ! Par ailleurs, sur le fond, je crois qu'ALC t'a largement répondu. <br /> <br /> @ Samantha, <br /> <br /> - sur les franchises : <br /> * c'est inefficace parce que si l'on réfléchit purement cyniquement :<br /> - la somme est beaucoup trop faible pour que cela ait un effet désincitatif (à la consommation de médicaments par exemple) sur les classes moyennes, qui sont les premières consommatrices en la matière ;<br /> * en revanche, la somme est trop forte pour les plus faibles revenus et du coup on perd autant en prévention et ainsi on accroit les pathologies soignées. Tu ne viens pas pour un rhume mais pour une pneumonie etc... De nombreuses études le démontrent, notamment dans le NHS anglais où une telle pratique avait été instaurée puis supprimée ;<br /> * enfin, on voit bien que personne ne sait vraiment où vont les fonds : Alzheimer, déficit de l'assurance-maladie ? Encore une fois, j'aimerais que quelqu'un m'explique. Personne n'a jamais été capable de le faire à l'UMP. <br /> <br /> - sur la loi SRU : je te rappelle que 20% est un objectif minimum et que c'est un vrai choix politique puisqu'il s'agit de favoriser la mixité (cf Lille par exemple). Sur les maires réélus, ce n'est pas vrai ce que tu dis, sinon il n'y aurait pas eu alternance dans un bon nombre de villes. ; <br /> <br /> - sur les classes moyennes : oui il ne s'agit pas que construire que du logement social (voir encore le document mis en ligne) mais par exemple, comme on le fait à Nantes, de développe rle PTZ additionnel pour les logements intermédiaires. D'autres initiatives existent également comme le bouclier logement, les outils de régulation du foncier... Beaucoup de villes ont mis en place une règle dite des doubles tiers : 1/3 de<br /> pavillons, 1/3 de maisons de ville, 1/3 d’habitat collectif et dans chaque catégorie 1/3 d’accession à la propriété, 1/3 de locatif intermédiaire, 1/3 de logement sociaux. Voilà des exemples concrets qui démontrent que les classes dites moyennes ne sont pas du tout négligées. <br /> <br /> Par ailleurs, Sharky, t'es vraiment gonflé de dire que ce gouvernement s'occupe de ce problème quand on voit le bilan des maisons Borloo à 100M€ : 3 seulement ont été construites !
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A
@ Sharky: <br /> - Sur l'intergénérationnalité: je précisais bien que cela fonctionnait si les règles d'attribution des HLM étaient correctement appliquées.. De plus, l'attribution d'un HLM ne dépend pas de ta place dans la file d'attente, mais de ta situation réelle. En effet, vu les critères d'attribution actuelle, 60% des gens sont éligibles au logement social. Par conséquent, tout le monde dépose un dossier, même s'il a peu de chance d'être accepté (c'est particulièrement vrai à Paris), ce qui fait grossir la file d'attente. Et heureusement, ce sont les situations les plus graves qui sont les plus prioritaires, ce qui fait que si tu es jeune et pauvre tu auras assez vite accès à un HLM, quelque soit la longueur de la file d'attente (sauf à Paris, ou la situation est particulièrement tendue; mais Paris n'est pas la France..).<br /> <br /> - Sur le coût du logement social: J'ai bien précisé que le logement social coutait à l'investissement: "l'intérêt de cette politique, c'est qu'elle ne coûte qu'à l'investissement". Mais ce qui est intéressant, c'est que cet investissement, si couteux soit-il, est aussi un actif à mettre au bilan des collectivités locals (puisque tu veux parler compta). Ce n'est d'ailleurs pas forcément un mauvais placement, vu la hausse du foncier que tu évoques.. Cet investissement génère par la suite des revenus, à savoir les loyers (qui couvrent en gros les charges d'entretien) et, de facto les allocations logement que l'on a pas à verser aux personnes logées dans le parc social. Tu conviendras que c'est quand même moins couteux et plus efficace que de payer 3000 euros par mois pour loger des gens dans des chambres d'hotel, non?
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S
Décidemment vous tournez en boucle avec les logements sociaux, (seule?) panacée socialiste s'il en est.<br /> <br /> @ John<br /> On pourrait mettre ton premier paragraphe dans le post de Chantal Sebille, j'en ai les larmes aux yeux. Pense aux charges de logements de millions de français dans les grandes villes que vous avez en charge en regard.<br /> Pour revenir sur le sujet de fond du pouvoir d'achat, quid de la hausse de 35% des impots régionaux des régions socialistes depuis 2004 (une petite ponction de 2 milliards sur les français). Décentralisation? (pourtant constitutionnellement compensée), à tître comparatif sur la même période, les départements de Gauche ont augmenté leur fiscalité de 33% de plus que ceux de Droite, hasard ou philosophie? Mais c'est vrai que vous avez gagné nombre de villes aux municipales, il y en a qui vont être surpris.<br /> <br /> Bravo pour ce bel axiome mathémathique, j'ai proposé les logements sociaux qui ne touchent factuellement qu'une minorité de la population, mais j'ai gagné les municipales, donc je suis le meilleur et le plus beau.<br /> Rien à redire, c'est malheureusement trop vrai vu sous cet angle simpliste!<br /> <br /> Cependant, si on estime que la loi SRU est appliquée à fond, à savoir 20%, que la masse regroupant classes défavorisée et moyennes représente 80%, ça en laisse 60% hors des bienfaits de la Gauche qui ne leur amène rien! Vu qu'à part donner on ne sait rien faire d'autre, c'est sur que ça devient compliqué.<br /> <br /> Mes sources. En fait mon 93% bananier n'est que 63% qui ne change pas grand chose au propos. Le 93% est juste la part des 63% qui veulent continuer les réformes.<br /> www.lefigaro.fr/assets/pdf/oway_20mars.pdf<br /> Tu n'es ni sourd ni aveugle, mais tu regardes juste dans la mauvaise direction et tu es un peu dur de la feuille.<br /> Pour Copé, je ne pense pas qu'il ait envie de parler avec toi.<br /> <br /> @ ALC<br /> <br /> Dans les 55% que tu oublies, une majorité a des charges de remboursement qui grèvent leur pouvoir d'achat.<br /> <br /> Quel beau concept, l'intergénérationnalité des HLM, tu n'as pas du y aller souvent. <br /> "on commence en HLM quand on a 22 ans et qu'on gagne un demi smic par mois en faisant des CDD à mi-temps, et on passe au parc privé ou on achète quand on est plus agé, en CDI et mieux payé"<br /> Sais-tu qu'il y a des liste d'attente de plusieurs années pour la majorité des HLM? A moins de n'avoir déposé ta demande à 15 ans, tu n'y rentre pas à 22 (désolé pour toi).<br /> Il n'y a qu'à voir la population HLM dont les tranches majoritaires sont dans la zones 30-55 ans.<br /> Ensuite, la hausse de l'immobilier fait que le saut entre HLM et achat n'est plus possible. Il y a, et je ne peux que le regretter, toute une génération (la tienne) qui est sacrifiée et aura le plus grand mal (sauf aide extérieure) à s'émanciper.<br /> <br /> Pour ton approche économique du logement social, tu n'as pas du prendre compta comme UV? C'est vrai que l'investissement à un coût égal à 0... une fois payé. Faut que j'en parle à mon banquier, ça le fera peut être rire. Belle leçon, il vote à Gauche, il devrait comprendre.
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A
Pour apporter ma pierre au débat:<br /> <br /> - Il ne faut pas comparer les 20% de logement HLM à 80% de français, mais plutôt aux 45% qui ne sont pas propriétaire de leur logement.. Ce qui fait que si la loi SRU était appliqué, plus de la moitié des locataires seraient logés dans le parc social (20% de HLM dans chaque commune, plus les commune ayant plus de 20% de HLM, nombreuses dans les banlieues populaires). <br /> <br /> - De plus, il faut replacer le logement HLM dans un cadre intergénérationnel: on commence en HLM quand on a 22 ans et qu'on gagne un demi smic par mois en faisant des CDD à mi-temps, et on passe au parc privé ou on achète quand on est plus agé, en CDI et mieux payé (tout cela suppose bien sur que l'on n'utilise pas la "méthode Tiberi" pour attribuer les HLM...). Presque tout le monde bénéficie alors de cette politique. <br /> <br /> - Il est également un peu utopique de vouloir loger tous les franciliens à Paris comme semble le désirer Samantha. La question pertinente est plutôt celle des transports en commun. Hors, qui a systématiquement sous financé la région Ile de France, l'empêchant d'améliorer le réseau (malgré quelques belles réalisations; cf. tramway en Seine St Denis)? Notre bien aimé gouvernement de droite chiraquienne puis sarkoziste... <br /> <br /> - Enfin, sur le coût des logements sociaux: l'intérêt de cette politique, c'est qu'elle ne coûte qu'à l'investissement. Une fois le logement construit, les charges sont financées par les loyers. Par conséquent, construire un logement social, c'est aider un ménage de manière importante pendant des décennies pour un coût nul. N'est-ce pas la droite qui ne cesse de prêcher l'Etat investisseur à long terme plutôt que dépensier à court terme, cher Sharky?<br /> <br /> - Et franchement, il faut quand même oser accuser la gauche de clientèlisme électoral quand on est de droite: Ceccaldi-Renaud, Balkany, Dassault, Tiberi, pour ne citer que les plus célèbres, sont bien sûrs des édiles désinteressés ayant à coeur l'intérêt général... Sans compter les fraudes électoral à Perpignan, et la région Ile de France qui a eu la surpris d'apprendre de la bouche du préfet que la couverture de la nationale traversant Neuilly était un chantier prioritaire devant être inscrit de toute urgence au plan d'aménagement du territoire.. <br /> <br /> En conclusion, la droite n'a vraiment de leçon à donner à personne, et la gauche en a beaucoup à lui donner dans le domaine de la gestion municipale..
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S
@ John<br /> <br /> - point n°1 / 2e paragraphe : pourquoi est-ce si inefficace selon toi? Je veux bien que tu explicites les contre propositions : je suis pas experte et ça m'intéresse de comprendre ce débat en détail!<br /> <br /> - sur le logement social : comment 20% de logement social (ou moins, très souvent) peuvent toucher 80% de la population? A ta place je décorrèlerais ça du % de voix pour les maires réélus - qui s'explique principalement parce que le maire de droite ne fait pas plus rêver (les suffrages, c'est un peu comme les marchés financiers : la rationalité est très théorique!)<br /> <br /> - "la plupart des constructions n'oublient certainement pas les classes moyennes" : pas compris ce que tu veux dire<br /> <br /> Merki
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