Un exécutif autocratique face à une majorité parlementaire indocile

Publié le par Section socialiste de Sciences-Po


Que l'on soutienne ou que l'on rejette l'opposition parlementaire existante en France, ce qu'on ne peut lui ôter, c'est son obstination à combattre tous les projets proposés, voire imposés par la droite. Le dernier en date étant celui du projet sur l'audiovisuel public. Ce phénomène n'est en rien nouveau et il fait partie de la vie politique depuis l'existence de la République. En revanche, ce qui marque l'année 2008, c'est la montée d'une pratique nouvelle, qui perturbe l'empressement des réformes. Je veux parler évidemment de l'opposition interne à la majorité présidentielle : 2008 aura été une année agitée pour l'exécutif, face à un groupe parlementaire réactif.

Les difficultés sont désormais tangibles pour le président. Ses réformes sont de plus en plus farouchement contestées, du moins en partie, par un nombre grandissant de députés UMP. Sur l'audiovisuel d'abord, où certains, dont François Baroin se sont retrouvés contre leur propre président de groupe, afin de dénoncer les carences que comportait la loi en termes budgétaires, et le caractère totalitaire de l'article prévoyant la nomination du président du groupe France Télévisions par le chef de l'Etat. Selon François Baroin, « la télévision, ce n'est pas EDF ». Par cette phrase se résume les revendications portées par le groupe parlementaire socialiste tout au long du débat sur l'article tant décrié.

Si sur cette loi, le président n'aura pas reculé, cela en a été autrement, quant à la loi sur le travail du dimanche. Inacceptable, elle a finalement été vidée de sa substance. Dans le même registre, la révision de la Constitution de juillet dernier a à son tour fait couler beaucoup d'encre et a soulevé des inquiétudes de la part des députés UMP. Son vote obtenu in extremis a été acquis à coups de promesses de possibles nominations futures et autres rappels à l'ordre, plus ou moins virulents. Sain usage du pouvoir. Désirant un projet qui, selon les propres termes du président, donnerait « davantage d'autonomie au Parlement dans la conduite de son activité législative et de contrôle de l'action du gouvernement », M. Sarkozy s'est permis d'utiliser des pratiques d'un autre temps, d'un autre régime, afin de parvenir à ses fins. De surcroît, Sarkozy dénonce l'indiscipline du groupe parlementaire et la partialité de son président, Jean-François Copé. Mais ne serait-ce pas tout simplement une conséquence logique de la pratique du pouvoir par l'exécutif, qui n'a pu empêcher d'éveiller chez les élus de la majorité une incompréhension liée au sens et à l'utilité des réformes ?

Toujours est-il que les relations entre les députés UMP et l'exécutif auront des difficultés à s'apaiser, avec la nouvelle loi organique sur le droit à l'amendement. Cette loi voulue par M. Sarkozy prévoit d'éviter toute obstruction prolongée des textes de lois qui freinerait leur vote, par l'instauration d'un « crédit temps » pour la défense des amendements. Les socialistes ont dénoncé un « bâillonnement » de l'opposition face à la volonté hégémonique du président. Car en fait il s'agit d'une mesure élyséenne qui prévoit de « limiter les pouvoirs d'une opposition qui fait son travail et d'une majorité indocile », selon Arnaud Montebourg. Une majorité indocile caractérisée par les nuances apportées par les deux présidents des assemblées en personne quant à l'application de ce texte. Gérard Larcher de son côté affirme que l'instauration d'un « crédit-temps » ne doit pas nuire au droit d'amendement, alors que Bernard Accoyer se dit partisan d'une « réécriture de certaines parties du texte ».

Le volontarisme présidentiel actuel, qui se caractérise par une rapidité d'action, voire un empressement, a été incompris de la part des députés, tout comme sa ligne politique obscure et incohérente. Ce manque de confiance dans l'action du gouvernement ne semble pas éphémère et la réponse apportée, par le biais de la loi sur le droit à l'amendement, est loin de satisfaire les attentes de députés, de tous bords confondus.

Aurélien S.

Publié dans Point de vue militant

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M
j'ai publié votre article dans mon blog,comme "invité du bistro de marco".Merci.<br /> Marco
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M
je publie cet article sur mon blog,comme "invité du bistro de marco".Merci. Marco
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J
Prochaine manifestation à Paris contre les bombardements de Gaza : Samedi 10 janvier à 15 h place de la République<br /> <br /> Merci de colporter l’info svp
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V
Dernière illustration en date : le report à une date indéterminée du projet sur le travail dominical. Nicolas Sarkozy commence à réaliser qu'il ne peut pas tout faire sans entrave et sans concertation. A nous d'en profiter !
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