Le cumul des mandats: je suis pour... euh non, je suis contre!

Publié le par Section socialiste de Sciences-Po

Il y a comme ça des idées tellement consensuelles que certains médias trouvent de bon ton d’aller à contre courant. Evidemment, tout le monde sait que le non cumul des mandats est dans la théorie une idée parfaitement consensuelle. Le Monde daté du vendredi 2 octobre trouve donc intelligent d’écrire un article intitulé « Cumulards et fiers de l’être ».
Parce que c’est évident que la majorité de la classe politique est profondément convaincue de la nécessité et du merveilleux d’un interdit du cumul des mandats. Restent quelques moutons noirs qui font figure de marginaux courageux et honnêtes, face à une telle déferlante de bonne volonté politique –hypocrite, on a bien compris.
Ou quand le journalisme échoue dans son rôle de poser les termes d’un débat…
 
Lors du référendum du premier octobre organisé par le Parti Socialiste, les militants avaient à répondre à une question en deux parties :
-Etes-vous favorables, comme étape vers le mandat parlementaire unique, à l’impossibilité de cumuler, sans attendre le vote d’une loi, dès les prochains renouvellements (cantonales 2011, Sénatoriales 2011, législatives 2012) un mandat de parlementaire avec une présidence d’exécutif local (Communes, Intercommunalité, CG, CR) ou la participation à un exécutif (Vice-Pdt, Maire adjoint )?
-Êtes-vous favorables à limiter à trois les mandats successifs des présidents d’exécutifs locaux (Maires, Présidents de Conseil Général, de Conseil Régional, et d’Intercommunalité) ?
 
Les militants ont voté oui respectivement à 72% et 75%.
Il reste ainsi, au sein même du parti socialiste, presque un quart des militants qui ont participé à ce référendum, opposés à l’interdiction du cumul des mandats. On peut supposer sans trop de risque que ces opposants sont en majorité des élus, dont l’opposition se comprend aisément.
Il faut distinguer sur le cumul des mandats deux types de discours. D’un côté, ceux qui accusent les élus de vouloir conserver leurs positions avantageuses et qui craignent que ceux-ci ne scient jamais la branche sur laquelle ils sont assis. Démonstration magistrale du contraire par ce référendum.
De l’autre côté, ceux qui défendent le cumul des mandats et osent avancer des arguments logiques et cohérents pour protéger de telles positions. Ce sont ces arguments que nous présente l’article du Monde, sans analyse, ni recul critique. Entendons-nous bien, ces arguments, ou plutôt le seul argument présenté, est valable, voire vrai. En effet, les élus interrogés affirment que sans un de leur mandat ils n’auraient jamais pu gagner l’autre.  Manque l’autre argument très souvent avancé : il faut à un élu national un ancrage territorial.
 
Pourquoi diable alors suis-je absolument totalement violemment contre le cumul des mandats ? Je ne comprends pas que si l’on supprime ce cumul, nous allons perdre des circonscriptions et des mairies ? Je ne comprends pas que si un député ne peut plus être maire, il va perdre tout sens de la réalité du terrain ?
Ce que je comprends, c’est que l’interdiction du cumul des mandats est une bonne chose pour la démocratie et pour la politique, car elle permettra de renouveler la classe politique, et de permettre aux élus de consacrer tout leur temps à une seule tâche. Ce que je comprends aussi, c’est qu’oser dire qu’un député perd son ancrage territorial et la réalité du terrain s’il ne peut pas aussi être maire de son patelin, c’est vraiment avoir le sens du ridicule. Les députés ne sont-il pas élus dans des circonscriptions ?
Ca c’était la théorie. Maintenant la pratique. Deux remarques de l’article du monde tirées des interviews sont particulièrement pertinents (oui quand même). La première, c’est que si la majorité présidentielle ne suit pas le Parti Socialiste en légalisant le non cumul des mandats, le Parti Socialiste se retrouvera en difficulté. C’est en partie vrai. En partie seulement, parce que ce n’est pas parce qu’un ténor local ne peut pas se présenter à une élection que cette même élection est perdue d’avance. Il y a au sein de notre parti de nombreux talents qui ne demandent qu’à être découverts et une population souvent favorable à un changement de tête.
La deuxième, c’est le statut de l’élu. Et c’est ici selon moi que la seule question épineuse concernant le cumul des mandats se pose. Un des avantages du cumul, c’est qu’il permet aux élus de s’assurer un revenu confortable pour vivre de la politique. Commence ici un très vaste débat sur la professionnalisation de la politique, la diversification sociale de nos élus, bref le genre d’élus que nous voulons. Et il est certain qu’une interdiction du cumul des mandats oblige concomitamment à redéfinir le statut de l’élu. Dans quel sens ? C’est un autre article.

M.P.

Publié dans Point de vue militant

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G
<br /> Prenez le temps de lire :<br /> http://www.marcfievet.com/article-la-supplique-de-l-electeur-socrate-45631416.html<br /> <br /> cette lecture pourra certainement améliorer la qualité des messages et échanges politiques<br /> et prenez la peine de m’indiquer si vous abondez dans ce sens.<br /> Votre avis est important pour moi.<br /> Merci de faire paraître, diffuser et faire connaître, car concernant tous les électeurs de quelque bord qu’ils soient.<br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> Kelly-Eric Guillon<br /> <br /> <br />
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E
<br /> Merci pour l'article<br /> Je pense que le vote du non-cumul aura aussi un effet très bénéfique, celui de l(éthique respectée. Ca fait longtemps qu'on entend des critiques socialistes sur le sujet mais sans avancées. Les<br /> socialistes n'ont plus qu'à l'appliquer pour retrouver une part de crédibilité.<br /> <br /> <br />
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