Les suppressions d’emplois : le catalyseur de la mobilisation universitaire ?
Ce jeudi 19 février 2009, la communauté universitaire se retrouvait encore une fois dans la rue pour dénoncer le décret modifiant le statut des enseignants-chercheurs. Ils étaient en tout entre 30 000 et 55 000 à répondre à l’appel de la coordination nationale des universités et des syndicats (FSU, CGT, FO, Solidaires, Sauvons l'université, Sauvons la recherche, Unef, Unsa-Education, AutonomeSup et le SNUipp). Au niveau des partis politiques, le PS était également représenté. Les cortèges comprenaient en grande majorité des étudiants, mais également des enseignants-chercheurs et des personnels Biatoss (Bibliothécaires, ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers, de service et de santé).
Suite à la mobilisation massive du 10 février dernier, Valérie Pécresse avait annoncé la nomination d’une médiatrice (Claire Bazy-Malaurie) tout en réaffirmant, au mépris de la contestation d’une grande partie des personnels concernés, que la réforme entrerait en vigueur à la rentrée 2009. Cette attitude hautaine vis-à-vis du personnel enseignant et des étudiants semble cependant nourrir davantage la crise et l’annonce mezza voce d’une médiation n’y change pas grand-chose. Cette fois-ci, même les présidents d’université qui suivaient le gouvernement depuis la fin de l’année 2008 ont conditionné leur participation à cette médiation à des exigences qui rejoignent celles des grévistes : le rétablissement des postes supprimés dans le budget 2009, la création d’emplois sur plusieurs années et le report à 2011 de la réforme de la formation des enseignants. Pour Lionel Collet, le président de la CPU (Conférence des présidents d’université), une sortie crise doit d’abord passer par des moyens humains supplémentaires : les 450 postes supprimés dans les universités ne sont pas acceptables.
Selon Valérie Pécresse (cf. le débat avec Bertrand Monthubert publié dans le Nouvel Observateur de la semaine du 19 février), la suppression de ces 450 postes se décompose pour moitié en allocataires contractuels et en emplois de catégorie C, mais il n’y a pas de suppression de postes d’enseignant-chercheur. La ministre préfère ainsi parler de redéploiement des effectifs des universités qui ont perdu des étudiants à d’autres qui en ont gagné : « il y a eu des gagnants et des perdants mais aucune suppression globale de postes d’enseignant-chercheur à l’université cette année, le taux d’encadrement reste le même ». Certes, mais ces suppressions de postes et ces inégalités entre les universités ne contribuent-elles pas à alimenter le mécontentement ?
Ce que traduit cette mobilisation des universitaires, c’est d’abord l’anxiété de réformes qui sont menées sans la prise en compte des différents partenaires sociaux. Comme le souligne Bertrand Monthubert dans le Nouvel Observateur, « il y a d'abord un problème de méthode : nous avons une succession de réformes qui n'ont pas réellement été élaborées en concertation avec la communauté scientifique et universitaire ». Ensuite, l’inégalité dans la répartition des moyens et les suppressions de postes laissent penser que l’enseignement supérieur et la recherche, au-delà des déclarations de principe, n’est pas la priorité d’un gouvernement privilégiant la sécurité à l’éducation, la hiérarchie à la concertation. Ces tensions jettent de l’huile sur le feu et attisent les incompréhensions mutuelles. Ce qu’il faudrait, ce qui est attendu du gouvernement, c’est moins un recul dans les réformes nécessaires des établissements de recherche et d’enseignement supérieur, qu’un signe fort de changement de méthode : l’écoute et la prise en compte des critiques venant des enseignants-chercheurs et des étudiants.