Le choc de la non-croissance
Mais d'autres incongruïtés apparaissent également.
La croissance française, que Nicolas Sarkozy voulait « aller chercher là où elle est », est apparemment bien cachée. Ou plutôt ne mord pas aux appâts tendus par la majorité UMP. Cette information n’est pas donnée par un économiste cryptocommuniste ou socialiste, mais par les documents fournis par le gouvernement à l’occasion du débat sur le PLF 2008. Parmi ces documents qui doivent être transmis au Parlement figure le rapport sur les prélèvements obligatoires (PO). Ce dernier est consultable sur le site www.performance-publique.gouv.fr.
Ce rapport analyse l’évolution des PO, et permet de prévoir le montant des recettes issues de ces prélèvements. En effet il n’est pas possible de connaître à l’avance de façon certaine le montant des recettes fiscales. Pour évaluer ces recettes on utilise deux éléments : l’évolution du PIB (la croissance), et la façon dont les recettes varient en fonction du PIB (que l’on appelle élasticité des PO à l’activité économique). Si on a une élasticité des PO de 1, cela signifie que lorsque le PIB croît de 1%, les recettes fiscales augmentent de 1%. Si l’élasticité est de 2, cela signifie que lorsque le PIB croît de 1%, les recettes fiscales augmentent de 2%.
Quelles sont les hypothèses retenues par le gouvernement pour 2008 ?
Le gouvernement retient une prévision de croissance comprise entre 2 et 2,5%, en précisant que la croissance sera probablement plus proche de 2 que de 2,5%. Face aux nombreuses contestations de ces chiffres (trop optimistes), le gouvernement a affirmé que les mesures qui figurent dans la loi TEPA et dans le projet de loi de finances permettront d’améliorer la croissance.
Mais le gouvernement sait qu’il ment. La croissance ne sera pas tirée par la suppression des droits de succession, ni par les mesures injustes et inefficaces des différentes lois votées par la majorité UMP… Les services de Bercy qui ont élaboré le rapport sur les prélèvements obligatoires voulaient probablement éviter que cette prévision de croissance irréaliste se transforme en un déficit abyssal (ce qui ferait mauvais genre alors que la France va prendre la Présidence de l’Union Européenne en 2008). Ils ont donc trouvé la parade : ils ont retenu un taux d’élasticité des PO très bas. Alors que celui-ci était de 1,6 pour 2006 et 1,9 pour 2007, il ne serait que de 1,1 pour 2008 selon les prévisions gouvernementales.
En effet si on fait une prévision de croissance trop élevée et qu’on l’accompagne d’un taux d’élasticité élevé, cela conduit à surestimer les recettes fiscales et peut donc provoquer un déficit très important.
Le gouvernement voulait éviter que sa prévision de croissance fantaisiste entraîne un dérapage trop important des finances publiques. Il a donc retenu un taux d’élasticité des recettes fiscales très bas. Dans la réalité la croissance sera plus faible qu’annoncée, et le taux d’élasticité des prélèvements obligatoires sera plus élevé.
Le fait que le taux d’élasticité retenu soit beaucoup plus faible que les années précédentes montre donc que le gouvernement sait que la croissance sera faible, très faible ! Personne ne croit donc aux prévisions de croissance annoncée par Mme Lagarde, pas même ses collaborateurs.